Cher terroriste
Éditorial

Cher terroriste

Hâbleur, râleur, effronté, ivrogne, affamé, déjanté, un peu con après le 6ème verre, jamais rassasié après la 3ème entrée, instruit, pervers, jouisseur, horrible chanteur, piètre danseur, curieux, compliqué, hargneux mais gentil, délicat et malpoli, je suis – moi, parisien cosmopolite et citoyen du monde – tout ce que tu détestes et redoutes, parce que je suis tout ce que tu es incapable de comprendre, et ne pourras jamais être.

J’aimerais pourtant t’expliquer à quel point c’est bien d’être moi, et t’inviter à faire partie de ma petite bande d’amis (quelques millions de citoyens qui jouissent des mêmes qualités), mais tu ne bois pas de vin, tu n’aimes pas la musique, et tu veux que ta femme ferme sa gueule alors que moi, je veux juste que la mienne m’explique ce qu’elle veut (clairement pour une fois, si possible).

Quand je te regarde, j’aimerais t’attraper violemment par les cheveux, mais je ne fais ça qu’aux gens qui m’excitent. J’aimerais me laisser emporter par ma grossièreté naturelle (car j’adore jurer, bordel) et te traiter d’enfant de putain, mais j’ai trop de respect pour les prostituées. Quand je te regarde, je me dis que la NASA trouvera de la vie dans l’espace avant de trouver une once de raison dans ta boîte crânienne, où seules résonnent les élucubrations incantatoires d’un autre amoindri à peine mieux outillé que toi.

En ce dimanche soir qui suit tes derniers exploits, plus que jamais je suis bien plus que toi. Car je suis Charlie, je suis Beyrouth, je suis Karl Andree – cet anglais condamné à 350 coups de fouet en Arabie Saoudite pour avoir transporté du vin dans son coffre -, je suis Afsaneh Nouroozi – condamnée à mort en Iran pour avoir tué son violeur -, je suis Loubna Abidar – actrice marocaine agressée pour avoir exercé son métier  -, je suis Raif Badawi – blogueur saoudien condamné à 1000 coups de fouet et 10 ans de prison -, je suis Tel Aviv qui danse sous les bombes et te rit au nez depuis 1948, bref… je suis citoyen d’un pays merveilleux, et je vis dans la plus belle ville du monde, et c’est déjà énorme.

Tu peux tuer tant que tu veux, tu ne pourras toujours pas comprendre nos plaisirs. Aujourd’hui, nous avons mal, nous pleurons la mort d’innocents tombés sans raison, la détresse se lit sur les visages, et la tentation de rester enfermé chez soi est grande. Mais dès demain, compte sur nous pour retourner danser, boire, rire, faire l’amour jusqu’au bout de la nuit, parce que nous devons cela à nos morts, nous les célèbrerons dignement, car notre plus grande victoire sera de vivre comme nous l’entendons, pas de nous terrer.

Je suis mon propre Dieu.
Nous sommes ici pour désapprendre les enseignements de l’Église, de l’État et de notre système d’éducation.
Nous sommes ici pour boire de la bière.
Nous sommes ici pour tuer la guerre.
Nous sommes ici pour rire des désagréments et vivre si bien que la Mort tremblera et craindra de nous emporter.

Charles Bukowksi

8 thoughts on “Cher terroriste

  1. Monsieur Lung, La citation de Bukowski super. Pour le reste, je vous recommande la lecture d’ouvrages de géopolitique parce que vous n’y êtes pas du tout à vrai dire.
    Sans agressivité aucune, arrêtez de répandre des idées approximatives. Nous avons besoin de lumière, de savoir, d’acceptation de la différence, loin des clichés, des raccourcis et des lieux communs en tous genres.
    Vous êtes ému, nous parisiens, le sommes tous… mais dans la pudeur et la discrétion. A chacun sa thérapie me direz-vous.
    A bientôt
    m.

    • Wai-Ming Lung

      No, merci pour votre message, mais il n’y a pas grand-chose de politique ou géopolitique dans mon article, bien au contraire. Vous y voyez des messages que je n’ai jamais eu l’intention de propager.

    • Wai-Ming Lung

      Merci, mais je n’allais tout de même pas arranger le texte de Bukowski pour qu’il convienne aux goûts de chacun 😉
      A ce propos, je ne suis pas particulièrement amateur de bière, mais je considère que repousser en bloc toute une catégorie de breuvages ne peut qu’être que l’idée d’un con. Et j’en ai connu !

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