Baieta

Julia Sedefdjian, plus jeune cheffe étoilée de France en 2016, a cessé de se la raconter aux Fables de La Fontaine et se met aux bisous. « Breaking News », aurait-on dit sur les réseaux sociaux, dans un anglicisme éhonté que seul Bernard Pivot et deux caciques mourants du Quai Conti auraient relevé. Baieta, ça veut dire « bisou » en dialecte nissard, et si aucun contact labial n’est prévu au menu de cette nouvelle table – qui remplace le regretté Itinéraires de Sylvain Sendra -, vous y découvrirez probablement la douce chaleur méditerranéenne que la talentueuse cheffe a tant à cœur.

Cette adresse a été testée sur invitation

Être naturel est une pose très difficile à garder

La décoration a été totalement revue, avec des bois clairs, des tons neutres, une simple vitre sépare désormais la cuisine de la salle, laissant deviner les brigades qui s’affairent. Pas de nappes, mais du caractère et une origine. Il est parfois répétitif, voire lassant de voir des origines méridionales portées en bandoulière, telle une pose contrainte et malaisée, mais il y a ici un accent de sincérité que l’empirique ne disputera pas à la théorie. Y a-t-il un âge pour parler de signature ? Le jaune d’œuf croustillant déjà présent au Champs de Mars tendrait à démontrer que non. Et puis, il y a la Bouillabaieta, interprétation toute personnelle de la sempiternelle bouillabaisse, énième circonvolution autour d’un classique, relevée de pastis avec sa rouille et ses croûtons. Enfin, il y a la petite tarte au citron que seule une coquetterie de langage qualifiera de petit. On se rend à certaines tables pour la patte, là on peut y aller pour la bise, parce que c’est simplement très bon.

Le 5ème goût

En salle, le service est nonchalant comme aux Fables, au risque de décevoir les clients exigeants, le charme du sud diront certains, mais l’expérience globale est plaisante, d’autant plus que dans un 5ème arrondissement peu couru pour sa festivité, il y a certes un pouvoir d’achat conséquent compte tenu de la population locale, mais il y a aussi la difficulté de se faire connaître et de devenir un point de rendez-vous. Sachant que l’équipe vient d’ouvrir son Bô, son bar à manger caribéen, le défi est relevé et nous sommes impatients d’en voir les résultats.