Restaurant La Fourchette du Printemps, Paris

Une bonne surprise est souvent bien plus rare qu’un talon-aiguille dans une botte de cuir. A la roulette russe du restaurant qu’un ami, puis deux, puis une colonie de Cisjordanie vous suggèrent, le grand perdant est souvent votre temps de vie, votre argent et, bien entendu, votre estomac.

Une Fourchette fait-elle le Printemps ?

La Fourchette du Printemps, c’est un nom digne du meilleur traiteur chinois aux dim sums fabriqués dans des conditions sordides dans un pavillon d’Ivry-sur-Seine, congelés puis recongelés au cas où pour plus tard, et pourtant. Après l’Assiette et le Bouchon dans le coin, il ne manquait plus que la Cuillère à Soupe et le Pot de Chambre, non ? Et pourtant, comment vous annoncer la mauvaise nouvelle ? La Fourchette du Printemps, en dépit de son nom pas terrible, c’est drôlement bon, accueillant, sincère, simple et sophistiqué à la fois, et étonnamment peu onéreux.

J’ai eu cette même incrédulité et la même envie de recommencer très vite après avoir goûté le Passage de Senderens (le Passage, pas l’arnaque du rez-de-chaussée avec le type qui n’est jamais là et qui laisse bosser son second). Prenez la Saint Jacques Rôtie dans son velouté de panais. Entre terre et mer, elle dégage iode, générosité et même une vigueur tout à fait inattendue pour ce type de préparation, au point d’éclipser les cuisses de grenouilles à l’ail et au persil de ma future maman de compagnon de table.

Passons à la lotte servie avec des St Jacques et langoustines dans une belle émulsion que je ne saurai restituer ici : la cuisson est juste, la portion menue et délicate mais compensée une nouvelle fois par la densité des saveurs. Petit mais costaud a-t-on envie de dire de ce Nicolas Mouton qui orchestre les fourneaux dans sa petite cuisine à l’arrière du restaurant. Arrosez le tout de petites rasades (c’était le midi, Mr Lung a un métier) d’un vin blanc de la Loire qui apporte à l’iode des plats sa touche de minéralité, il n’y a aucune raison de ne pas repartir heureux.

Heureux qui comme le mec qui s’est tapé la trotte jusque dans le 17ème

Heureux, c’est un mot qui peut sembler trop fort, mais pour 42€ la formule, c’est le seul mot que le chercheur de bonnes affaires aura en bouche. Quand on pense que le Fooding (qui s’est laborieusement fendu d’un demi-feuillet sur le sujet) et autres suivistes au palais de crépi préfèrent s’extasier sur Saturne, je me dis que la Fourchette du Printemps a finalement bien fait de choisir un sobriquet aussi tarte : ça repousse les cons.

La Fourchette du Printemps
17, rue du Printemps 75017 Paris
Tél. 01 42 27 26 97